C’est bon, on est guéri! (danse de la joie!)
Maxine a repris le chemin de l’école lundi et nous celui du boulot. J’ai jamais été aussi contente d’aller bosser de toute ma vie.
On a survécu au covid.
Franchement on va pas se plaindre, on a pas eu de forme grave, aucun de nous deux n’a été à l’hôpital, Maxine a été assez kiki (dans la mesure de ses capacités) et on était isolés et coupés du monde mais dans notre forêt plutôt que dans un 30 mètres carrés en ville. Y’a pire.
Je sais pas comment on s’est démerdé pour attraper deux formes différentes mais pile au même moment, je sais pas non plus comment Arnaud n’a pas été plus mal alors qu’il avait le variant Britannique (lui qui a toujours voulu être Anglais) et je refuse d’émettre des hypothèses douteuses parce que, même si j’ai eu le covid, je suis toujours pas épidémiologiste. Ni docteur. Tout ce qui compte c’est qu’on soit guéris. Pile pour la réouverture des terrasses, moi je pense qu’on a vraiment beaucoup de chance.
Alors bien sûr ça n’a pas été facile tous les jours mais dans notre malheur on a eu la chance d’être à l’article de la mort un jour sur deux et en décalé donc il y en avait toujours un à peu près en état pour s’occuper de Maxine. Elle, de son côté, avait très bien compris qu’on était malade et a été assez mignonne, disons qu’elle nous a pas surmené, elle était juste contente d’être à la maison avec nous. (C’était pas un pique nique à la campagne non plus, je veux dire, on est quand même en plein dans les terrible two, un jour elle m’a fait un caprice de l’espace parce que quand elle m’a demandé de la porter j’ai dit « deux secondes, je pose mon panier et je te prends sur les épaules ». Apparemment ça justifiait de se rouler par terre au milieu de la route en pleurant pendant 10 minutes.)
Il y a eu des moments très doux, les longs câlins sous un plaid, les cafés au lait au lit, les petites balades pour prendre l’air et ramasser des fleurs, regarder pousser les semis dans la serre. Des moments suspendus hors du temps à regarder Maxine faire un truc complétement banal et à avoir les larmes aux yeux d’amour et de fierté (Et à me mettre des gifles mentales en même temps parce que c’est pas possible d’être « mamoune » à ce point. On va mettre ça sur le compte de la maladie, je me croyais mourante.).
Il y en a eu des plus compliqués où je me serais volontiers tapé la tête contre les murs pour que la migraine s’arrête et injecté le doliprane direct en intraveineuse avec une seringue sale tellement j’en pouvais plus.
Il y a eu une journée d’angoisse complétement incontrôlée et incontrôlable où j’étais dans tous mes états. J’avais une peur panique qu’on finisse tous les deux en réa, voir pire, et j’ai appelé toutes les marraines de Maxine pour être sûre qu’elles savaient bien quoi faire au cas où et qui prenait Maxine. (Cela n’ayant aucune valeur légale j’ai passé les trois jours suivants à convaincre Arnaud qu’il fallait qu’on fasse faire un testament sur le principe du « on sait jamais ». Il a fini par capituler.)
Il y a eu un moment où j’ai complétement perdu le peu de foi en l’humanité qu’il me restait. En se promenant autour de la maison on a croisé notre voisine, on lui a dit qu’on avait le covid, elle a reculé lentement (je pense que si elle avait pu elle aurait couru) en nous regardant de la tête aux pieds et en disant « mais la petite, c’est pas dangereux pour elle? » puis elle est parti en marchant très vite (encore une fois, si elle avait pu courir…) pour dire à l’autre voisin qu’on était malades. Du coup en 2 minutes tout le « village » savait qu’on était isolés chez nous avec notre petite et pas de possibilité de sortir mais personne ne nous a demandé si on avait besoin de quoi que ce soit. Jusqu’au cinquième jour. Là le voisin (après s’être fait engueuler par sa fille parce qu’il y avait pas pensé) nous a proposé d’aller nous faire des courses, ce qu’on s’est empressé d’accepter parce que le frigo commençait à dangereusement ressembler à un magasin de l’ex URSS.
Cet épisode m’a fait littéralement bouillir de colère. Et pendant que je m’énervais toute seule Arnaud, lui, ne comprenait pas pourquoi j’étais surprise parce que d’après lui il n’y avait pas « de quoi tomber de sa chaise ». Je suppose que parce que je viens d’un coin de paradis/campagne où l’entraide est encore un vrai truc et où, comme dit ma mère, « ce ne serait jamais arrivé », je ne suis pas équipé mentalement pour comprendre. Et sur les cinq adultes qui vivent dans notre forêt je suis la seule « du pays ». La culture doit pas être la même en ville (Je m’appelle Amandine, j’ai 33 ans et je vis au pays des Bisounours). Mais quand même, je trouve très con de pas penser à aider tes voisins quand tu approches dangereusement de l’âge où on se fait facilement le col du fémur et que, les-dits voisins, sont deux jeunes (que personne ne rigole!) soignants/travailleurs sociaux. Je pose ça là en passant.
A part ça, j’ai « profité » de ces deux semaines pour faire des semis (c’est la crise du logement dans la serre y’a plus un centimètre carré de libre), passer du temps avec Maxine, lui faire découvrir les comédies musicales (Elle est à fond sur la mythologie Grecque avec son père. Et elle apprend à jouer au poker. Faut équilibrer), la regarder grandir (parce que très franchement y’a eu des moments où je pouvais pas faire plus) et j’ai appris à faire de la confiture de pissenlits (Mon Dieu que c’est chiant à faire mais put*** qu’est ce que c’est bon!). Et c’est tout.
Et franchement c’est déjà pas mal.
On a carrément masterisé l’art d’occuper Maxine avec rien (elle peut passer 20 minutes à jouer avec des fleurs pour « faire je t’aime ») et de vivre de très grands bonheurs avec vraiment pas grand chose (j’ai découvert les « câlins en famille allongés dans un pré fleuri en regardant passer les nuages », ma vie est transformée). Ce qui est très chouette c’est que comme on on pratique le « il en faut peu pour être heureux » depuis sa naissance (et possiblement aussi parce qu’elle a passé presque la moitié de sa vie en « pandémie mondiale de ta mère! ») elle trouve que faire le goûter dans sa cabane c’est aussi bien qu’aller au resto (les petits bonheur simples), elle voudrait aller au cinéma mais elle sait qu’on ne peut pas donc elle est à fond quand on regarde un film dans le noir en mangeant des bretzels et en buvant un sirop et elle construit des multiplex en lego (résilience) et elle à l’air de croire que que le prés en bas de chez nous et le chemin qui longe la rivière valent carrément les deux parcs Disney (décroissance). Et rien que pour ça, je nous décerne une gommette/médaille/légion d’honneur de la parentalité.
Et vous comment ça va?