« Hoooooooooo, c’est pour quand?! ». Pas le temps de répondre que c’est pour fin septembre qu’il y’a deux mains posées sur mon ventre. Les mains de quelqu’un que je ne connais pas. Et qui ne m’a pas demandé si il pouvait me tripoter le bidou.
Ce n’est pas la première fois depuis le début de ma grossesse. Ce n’est pas la première fois depuis le début du mois. C’est même pas la première fois de la journée. Ceci dit je suis inconsciente, sortir de chez moi pour aller au marché et espérer qu’on me foute la paix…
Au début de ma grossesse j’avais hâte d’avoir mon bidou. Ça rendrait tout plus réel, les gens seraient gentils avec moi, on me laisserait passer devant à la caisse, j’avais repéré une jolie robe de grossesse et j’ai toujours trouvé les femmes enceintes très belles.
Je me foutais le doigt dans l’œil. Jusqu’à la troisième phalange.
D’abord parce que ma grossesse est devenue très réelle quand il a fallu la déclarer à la CAF et qu’on m’a donné la liste de tous les rendez vous et démarches administratives et que je me suis mise à pleurer comme une hystérique dans le bureau de la sage femme. (J’aime pas faire des papiers ok?!).
Ensuite les gens ne sont pas devenus gentils avec moi mais condescendants. Et tous les parents autours de moi étaient aussi devenus sage femme/gynéco/médecin/tabacologue. Apparemment. On a commencé à me traiter comme une ado et c’est très vite devenu insupportable.
On ne me laissait passer à la caisse qu’à contre cœur et il fallait que je le demande. Et la plupart du temps j’osais même pas. Mention haineuse spécialement dédicacée à la mamie qui avait un chariot plein et qui ne m’a pas laissé passé alors que j’avais deux articles mais qui m’a quand même tripoté le bidou sans même me dire bonjour. Elle a pas été déçue du voyage.
Et mention spéciale aussi, big up et merci, au seul monsieur qui m’a laissé sa place dans le métro à Paris sur tout un weekend. Alors qu’il faisait 8000 degrés. UN SEUL!
La robe que j’avais repéré était effectivement très jolie mais j’ai découvert avec effroi que tout ce qui porte une étiquette « grossesse » ou « bébé » est tout de suite deux fois plus cher qu’un truc avec une étiquette normale. (Et encore pour les trucs de femme enceinte, y’a un peu plus de tissus, limite, je veux bien comprendre, mais faudra un jour m’expliquer comment un collant taille 3 mois peut coûter 22 euros. Y’a de l’or dedans? Comment ça s’organise?).
Et quand au mythe de la femme enceinte belle… Tout le monde les trouve très belles sauf elles même, apparemment. Je vous referais pas le couplet sur les joies de la grossesse, Florence Forresti a fait un travail très complet dessus, que je vous encourage à regarder d’ailleurs, je vous dirais juste qu’après 9 mois à avoir eu des compliments sur ma beauté radieuse le retour à la réalité a été bien dur. Moi j’étais plus belle du tout, et ma fille était magnifique. Du coup les gens, quand vous allez voir une jeune maman, pensez au petit mot gentil, même si elle a des cernes jusqu’au milieu des joues, les cheveux ternes et/ou sales, le ventre qui pend et qu’elle est en jogging avec du vomi de bébé sur le tee-shirt. Elle en a besoin!
Et au milieu de tout ça mon bidou était devenu propriété nationale que tout le monde avait le droit de toucher sans me demander la permission et que tout le monde pouvait commenter aussi. La encore mention spéciale à la dame qui m’a soutenu mordicus que mon accouchement était imminent parce que mon ventre était trop bas. Pas juste bas notez bien. TROP BAS. Et quand je lui ai dit que je sortais d’un monito à la maternité et que la sage femme ET le gynéco m’avaient dit que c’était pas du tout pour tout de suite elle m’a répondu « Non mais moi j’en ai eu deux je vous le dit ». Ha pardon, autant pour moi, je savais qu’avoir un enfant équivalait au 5 ou 10 ans d’études des professionnels. Je suis con aussi!
Donc passé le moment de bonheur où mon bidou a commencé à se montrer j’ai vite regretté que ce soit pas la cigogne qui amène le bébé. Déjà j’ai dû commencer à me cacher pour fumer. J’ai dû raconter ma grossesse et parler de ma vie à de parfaits inconnus. Et je me suis faite tripoter comme jamais de ma vie. Y’a même un jour, ou après que 10 personnes m’aient touché j’ai eu un mouvement de recul avec la onzième, j’ai dit « désolée on ne se connait pas » et bien, croyez le ou non je me suis faite engueuler! « Vous avez qu’à mettre un panneau qu’elle m’a dit la vieille! Heureusement pour elle j’étais sous le choc sinon je l’aurais tarté!
D’ailleurs y’en a eu une a qui j’ai tapé la main avant même qu’elle n’arrive à la poser sur mon bidou. Elle l’a pas vu venir, moi non plus d’ailleurs, j’étais mortifiée mais à 8 mois de grossesse j’en pouvais plus.
On ne touche pas les ventres des gens gros en leur disant « bravo t’as bien mangé! ». On ne touche pas les fesses des filles minces en leur disant « bravo t’as bien fait tes squats ». Alors pourquoi on tripote tout le temps les femmes enceintes en les félicitant?! Oui parce-qu’en plus, excusez moi, mais avoir un rapport non protégé qui fait qu’on tombe enceinte n’a rien d’un exploit, je suis enceinte les gens, j’ai pas trouvé la solution au conflit israelo-palestinien, détendez vous.
Alors s’il vous plaît, la prochaine fois que vous voyez une femme enceinte et qu’il vous prend cette envie incontrôlable de lui tripoter le ventre asseyiez vous sur vos mains! Ou au moins, par pitié, demandez la permission. Et acceptez un refus sans vous vexer. C’est plus dur pour elle que pour vous. Mais s’il vous plaît, par pitié, lâchez nous le bidou!